Avis d'expert par Yasmina Madafi, co-fondatrice de La Nouvelle Agence
Mars 2020 a marqué un bouleversement sans précédent : confinement, restrictions sanitaires et surtout, une surabondance d’informations diffusées en continu. Face à l’urgence, les médias traditionnels se sont imposés comme des relais d’information essentiels. Mais très vite, les contradictions entre experts, la gestion politique de la communication et la montée des fake news ont profondément modifié la perception du public.
Cinq ans après, force est de constater que cette période a laissé une empreinte indélébile sur la relation entre les Français et les médias. La crise sanitaire a amplifié la méfiance envers les sources officielles, accéléré l’essor des canaux d’information alternatifs et renforcé une fracture entre ceux qui se tournent vers les médias traditionnels et ceux qui les rejettent.
L’hyper-information, un facteur de défiance
Durant la pandémie, l’information a été omniprésente : chiffres quotidiens des contaminations, annonces gouvernementales, analyses scientifiques… Un flot continu qui a souvent créé confusion et fatigue informationnelle.
Les médias se sont retrouvés pris entre deux feux : d’un côté, une audience en quête de repères, de l’autre, des accusations de dramatisation excessive. Cette saturation a entraîné un rejet progressif de certains canaux d’information, au profit de plateformes alternatives où les débats étaient plus libres, mais aussi plus exposés aux rumeurs et aux fausses nouvelles.
YouTube, X (encore Twitter, à l’époque), Telegram… De nouveaux espaces d’information ont explosé pendant la crise, attirant une audience en quête de discours plus variés. Certains experts, écartés des plateaux télévisés, y ont trouvé un moyen d’exister, contribuant parfois à diffuser des théories controversées.
Cette diversification des sources a profondément changé le paysage médiatique. Désormais, les Français ne consomment plus l’information de manière homogène : une partie continue de se fier aux médias traditionnels, tandis qu’une autre se tourne vers des figures indépendantes et des communautés en ligne.

Une communication sous tension pour les entreprises et les institutions
Pour les communicants et les agences de relations presse, cette évolution représente un défi majeur. Comment s’adresser à un public dont la confiance dans les médias est fragmentée ? Comment éviter que des prises de parole officielles ne soient perçues comme de la propagande ?
Les stratégies de communication doivent aujourd’hui intégrer cette défiance : plus de transparence, de pédagogie, mais aussi une meilleure gestion des critiques. Les entreprises et institutions doivent comprendre que leur parole est scrutée, analysée et, parfois, rejetée. Travailler avec des médias crédibles ne suffit plus : il faut aussi investir les nouveaux canaux pour recréer du lien avec les audiences sceptiques.
Quel avenir pour l’information ?
Cinq ans après le confinement, le paysage médiatique n’a jamais été aussi éclaté. La confiance dans l’information institutionnelle ne se reconstruira pas en un jour. La clé réside sans doute dans un journalisme plus participatif, une communication plus ouverte et un dialogue constant entre les acteurs de l’information et leur public.
Pour les professionnels des médias et des relations presse, il ne s’agit plus seulement de diffuser un message, mais de reconstruire une relation de confiance. Un défi immense, mais nécessaire dans un monde où l’information est plus que jamais au cœur des débats de société.
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